jour

09

J’aime les romances fantastiques. J’aime quand mes personnages ont des dons et qu’ils s’en servent pour illustrer combien la nature humaine est complexe. Jessie est télépathe, mais elle est zen. Elle ne juge personne à cause de leurs pensées. Elle trouve généralement agaçant d’être dans une foule ou avec des gens, en général, mais il arrive qu’un homme lui soit agréable à écouter, même s’il a une tête bien encombrée… 

Télépathe

— Qu’est-ce que je dois comprendre ? Que si je t’avais invitée, t’aurais dit oui ?

— Peut-être, répond-elle vaguement. Disons que ça dépend de ta tête. Ce que tu penses, ce que tu veux, ce que tu t’imagines.

Je me mets à rire comme un idiot.

— Arrête avec cette histoire ! Je vais commencer à avoir peur de ce que je pense !

— Peut-être que tu devrais, renchérit-elle en me jetant un regard espiègle.

Sa façon de me tenir tête me plaît. En fait, c’est pire : tout ce qu’elle est me plaît. C’est absurde, parce que je ne la connais pratiquement pas, mais c’est ainsi. Chaque fois qu’elle ouvre la bouche, elle me colle au mur, me surprend, me fait rire, me trouble. Rien de ce qu’elle est ne me laisse indifférent. Peut-être parce que nous sommes là, dans ma voiture, et que nous discutons sans nous prendre la tête ?

— C’est vrai que nous sommes bien, chuchote-t-elle en fermant à nouveau les yeux.

Je profite du fait qu’elle garde les yeux clos pour observer son visage en songeant que si elle s’endormait là, je ne suis pas sûr que j’aurais le courage de la réveiller, mais peut-être que je me risquerais à l’embrasser. Alors que je souris bêtement, elle se met à rire et rouvre de nouveau les yeux.

— Tu n’oserais quand même pas m’embrasser en traître ? s’informe-t-elle.

Je sursaute et me redresse sur mon siège. Cette fois, je réfléchis sérieusement au fait qu’elle pourrait être capable d’entendre mes pensées. Comment on appelle ces gens qui arrivent à faire ce genre de choses ?

— Une télépathe.

Ma bouche s’ouvre sous le choc et je recule, mon dos se collant contre la porte de ma voiture. C’est idiot, je le sais, mais on dirait que j’ai besoin de prendre du recul pour mieux la dévisager. De son côté, elle reste immobile, puis elle recommence à rire.

— Je t’effraie tant que ça ?

— Je… pas vraiment. C’est juste que…

— C’est bizarre, je sais, reconnaît-elle. T’inquiète, je ne t’en veux pas. J’ai l’habitude.

Elle se penche vers l’avant et défait sa ceinture de sécurité. L’ai-je froissée ?

— Jessie, donne-moi au moins deux minutes pour me faire à l’idée ! Tu me lances ça comme ça !

Elle se cale à nouveau dans son siège, le corps complètement retourné dans ma direction et force un sourire à s’inscrire sur ses lèvres.

— Je te laisse toute la nuit. Et plus de temps, s’il t’en faut. Tu n’as qu’à passer demain. Si tu ne viens pas, ce n’est pas grave. Je ne t’en voudrai pas, OK ?

Sans attendre ma réponse, elle ouvre la portière, descend de ma voiture et referme derrière elle. C’est plus fort que moi : je m’empresse de défaire ma ceinture et je bondis hors de la voiture à mon tour.

— Je serai là vers sept heures. C’est trop tôt ?

— C’est parfait. Je ferai du café.

Avant même que je puisse dire quoi que ce soit, elle se retourne avec un visage souriant :

— Je promets de le faire moins fort que la dernière fois, ça te va ?

— Super. À demain.

— À demain.

Elle grimpe les marches qui la mènent à la porte d’entrée, se tourne à nouveau vers moi et parle fort pour que je l’entende à cette distance :

— C’est bon, tu peux rentrer chez toi !

— J’ai promis à Joe de te ramener saine et sauve. J’attends que tu sois à l’intérieur et que tu me confirmes que tout va bien.

— Je vois. Un chevalier servant, c’est ça ?

Ses propos sont moqueurs, mais son rire est agréable et je confirme ses dires sans ressentir la moindre gêne, pour une fois. Je l’observe entrer chez elle, ouvrir les lumières et me faire signe à travers la fenêtre avant que tout va bien.

C’est bête. S’il n’en tenait qu’à moi, je resterais là et j’attendrais l’aube. Au lieu d’être effrayé, je suis simplement sous le choc de ce que j’ai appris ce soir. Pas seulement parce qu’elle arrive à lire dans ma tête, mais surtout parce qu’elle s’est confiée à moi.

Extrait tiré de…

 

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